Emmanuel Macron giflé : L’agresseur du président est un fondateur de deux asbl d’arts martiaux.
L’homme qui a giflé le président Emmanuel Macron, mardi 8 juin 2021 dans la Drôme, est un fan d’histoire médiévale qui suit l’extrême droite royaliste sur les réseaux sociaux, mais que l’on décrit comme apolitique et non violent dans sa commune.
Damien T., 28 ans, interpellé à Tain-L’Hermitage, habite Saint-Vallier ( Drôme) au nord de Valence en France . Il y a fondé deux associations dans les arts martiaux historiques européens – une pratique de combats « tombés dans l’oubli » qui compte 1.500 pratiquants en France – et les jeux de plateau à figurines.
Il y côtoie son ami Arthur C., 28 ans, arrêté à ses côtés après avoir filmé l’agression du chef de l’Etat. Rencontré mardi soir à Saint-Vallier, Loïc Dauriac, 36 ans, est un ami des deux hommes – le second est le parrain de sa fille. Il se trouvait d’ailleurs avec eux avant le passage d’Emmanuel Macron.
Les trois ont été filmés par une équipe de l’émission Quotidien. Parti avant la gifle, il dit avoir été « énormément » étonné par le geste de Damien T. : « Ce n’est pas quelqu’un de violent ». Deux commerçantes voisines de l’association de jeux confirment, évoquant « un gamin sans histoires ».
Pas d’opinion politique mais abonné à des comptes d’extrême droite
« C’est pas du tout le style de la personne », abondent encore deux anciennes camarades de collège et de lycée croisées dans Saint-Vallier. « Et il n’a jamais montré d’opinion politique, à ce qu’on sache. » Idem pour Arthur C., selon un habitant qui le côtoie dans un conseil de quartier. « Franchement je suis tombé du sixième étage, je ne comprends pas, ce garçon a dû se laisser entraîner », affirme-t-il au téléphone. « Je le côtoie dans nos réunions, où l’on ne parle pas de politique, ni de religion ; on est là pour la ville, pour aider les gens, et il a toujours été correct avec nous, très sensé dans ses raisonnements », ajoute-t-il.
Sur YouTube, Damien T. est cependant abonné à plusieurs chaînes d’extrême droite, comme celle d’Henry de Lesquen, condamné en 2018 pour provocation à la haine et contestation de crime contre l’humanité ; ou royalistes comme celle du Cercle Richelieu. Sa page Facebook indique qu’il « aime » celle du groupe Action Française Lyon, parmi d’autres des mêmes mouvances. Interrogé sur ces fréquentations en ligne, Loïc Dauriac répond qu’il n’est « pas surpris » car son ami « est de nature curieuse ». Mais « il n’a pas ces idées-là ». « Il est contre les royalistes. Pour lui, ils ont des idées à la con », assure-t-il.
« Défendre la belle image de la France »
Pourquoi, dès lors, avoir prononcé leur cri de guerre, « Montjoie Saint-Denis », en s’en prenant au président ? Pour Loïc Dauriac, il ne faut pas y voir une référence royaliste mais plutôt une allusion au film Les Visiteurs : en bon « médiéviste », il aurait pu tout aussi bien lancer une réplique de la série télévisée Kaamelott. Selon lui, Damien T. vit de petites missions d’intérim après avoir entamé, sans les achever, des études de thanatopraxie ( les soins effectués sur un défunt.) .
Ses deux associations visent à faire vivre la commune et son histoire, « assez riche avec Diane de Poitiers » (qui fut comtesse de Saint-Vallier), à « défendre la belle image de la France ».
Et d’expliquer le geste du jour par des rancœurs contre un discours d’Emmanuel Macron, en 2017, sur la diversité de la culture française ; par les difficultés « à joindre les deux bouts » ; par le « gros ras-le-bol » face à un président « qui ne nous écoute pas ». « Ces gens-là, ça fait des années qu’ils n’ont pas voté », conclut Loïc Dauriac au sujet des mis en cause.
Réagissant à une chaine de télévision de la France, le président Macron a qualifié cet acte comme un fait isolé.
Monsieur le Président, comment réagissez-vous à l’incident au lycée de Tain-l’Hermitage ?
« Tout va bien. Il faut relativiser cet incident qui est, je pense, un fait isolé. Il ne faut pas que cela vienne occulter le reste des sujets si importants qui concernent la vie de beaucoup.
Il faut respecter les fonctions dans la République et je ne lâcherai jamais ce combat. Les fonctions, quelles qu’elles soient, sont plus grandes que nous et ne doivent pas faire l’objet d’agression particulière. J’ai d’ailleurs écrit dernièrement à un des maires de la Drôme qui avait été agressé.
En République, il y a la liberté d’expression, de controverse, la liberté de vote, et le pluralisme démocratique qui fait qu’on peut se séparer des gens à qui on donne mandat de manière régulière et qui votent les lois pour vous. La contrepartie de ça, c’est qu’il ne peut pas y avoir de violence, de haine, ni dans le discours ni dans les actes. Sinon c’est la démocratie elle-même qui est menacée. »
Avez-vous l’impression que le climat politique se dégrade ?
« Non. Je ne voudrais pas que des individus isolés ou des gens qui vont vers les extrêmes puissent, en quelque sorte, faire oublier le reste. Le peuple français est un peuple républicain. L’écrasante majorité des Français est intéressée par les problèmes de fond. Sur le principe, je serai intraitable, mais ne laissons pas des faits isolés, des individus ultraviolents, comme il y en a toujours quelques-uns dans les manifestations aussi, prendre possession du débat public : ils ne le méritent pas. »
À titre personnel, vous n’avez pas d’appréhension ?
« Non, aucune. D’ailleurs j’ai continué et j’ai salué les personnes présentes qui étaient à côté du monsieur et j’ai fait des photos avec elles. J’ai continué et je continuerai. Rien ne m’arrêtera. »
Avec 20minutes.fr